vendredi 20 octobre 2006

Zouc par Zouc

Une pièce dont à ma grande honte mais au soulagement des courageux visiteurs qui lisent mes longs compte-rendus, je ne pourrais pas dire grand chose vu que je me suis assoupie à deux reprises^^;;; Pour ma défense, mon pooopa a rencontré et cédé à la même tentation de Morphée!
Pourtant l'idée de voir monologuer Nathalie Baye sur scène me tenait fort éveillée lorsque le rideau se leva. Surtout, je venais d'apercevoir Mimi Mathy et son mari venir soutenir leur toooppinnne, or pour une fois que je reconnais un "people", la bonne humeur ne pouvait qu'être de mise.
Sur le papier, une idée saugrenue, le mélange de l'huile et du vinaigre. Dans "Zouc par Zouc", la blonde, filiforme et posée Nathalie Baye incarne Zouc, Isabelle von Allmen cette comique suisse rondelette, toujours flanquée d’une robe noire, aux longs cheveux raides, aux grands yeux noirs, aux intonations distinguables entre mille mais que je ne connais que pour sa caméo dans le clip de Mylène Farmer, Sans Contrefaçon (on a les références qu'on peut^^) où elle interprétait la gitane inquiétante mais tendre qui donne vie au pantin.
La transfiguration du N en Z, d'autant plus brillante et mémorable que Nathalie n'avait pas posé un pied sur les blanches depuis plus de dix ans et que Zouc a disparu de notre paysage depuis presque de deux décennies, rongée par la maladie et a mené une vie souvent éprouvante avec un courage remarquable. ET ce sont ces luttes qui forment le coeur de la pièces, ses confidences qui s'animent sous la plume du journaliste Hervé Guibert, emporté par le sida en 1991.
En 1974, elle lui confie à 24 ans- lui 19- à la terrasse d’un bistrot, huit après-midi durant, son enfance sur le fil du rasoir où elle se croit être la tare de sa famille. Môme, elle admire les morts dans leur chambre, se galvanise des horribles drames de son entourage et rêve de « marier un paysan ». Ce qui lui faudrait dix-huit mois d'internement sous l'autorité de ses propres parents. Là dans ce mouroir des esprits égarés, elle apprend à faire comme les autres, à être comme eux, se cultivant des rituels, des monomanies... puis son arrivée à Paris et les rencontres providentielles qui l’ont conduite à se dépasser sur scène.
Mais alors que toutes les conditions sont réunies pour nous retourner les tripes, l'encéphalogramme de l'émotion a le tracé désespérément plat. La faute n'en revient pas au peu de ressemblance physiques entre ces deux grandes dames mais à une mise en scène minimaliste qui voit Baye timidement sauter de chaise en chaise et triturer un petit kleenex, la voix et la présence monocorde devant un écran lumineux qui tourne de temps en temps au rouge avec toutes les demi-heures un riff de guitare sans compter la figuration muette incompréhensible de Philippe Hérisson sensé probablement symboliser Hervé Guibert mais qui ne pipe pas mots et qui est totalement inutile...

Le rare mérite de ce spectacle décevant est d'avoir fait sortir de l’oubli une grande artiste au destin cabossé. Ça n’est déjà pas si mal... sans oublier le clou de cette heure au moment des rappels . Un étudiant en théâtre trop chou (vague tige blanche à gauche sur la photo) et balbutiant d'admiration pour la talentueuse Nathalie (point noir en contre-jour sur l'écran, si, si! Vous remarquez que mon appareil photo téléphonique est toujours aussi serviable et performant!), s'est avancé timidement sur scène et lui a galamment remis un bouquet de fleurs. Elle était tout rougissante.... Cro, cro mignon !

Zouc par Zouc mis en scène par Gilles Cohen avec Nathalie Baye. Au théâtre du Rond-Point à Paris, jusqu’au 30 décembre 2006

lundi 16 octobre 2006

Je nous aime beaucoup

Ah les week-end à la campagne, c'est le pied surtout lorsqu'on est coincé par temps d'orage à cause d'une noce à laquelle on ne peut échapper. C'est cette expérience appétissante que vivent malgré eux cinq invités dans une demeure du Gers, et l'ambiance est d'autant plus favorable au kaaaaarnaaage que ces 5 visiteurs ne sont guère ravis de se retrouver. D'abord deux générations aux valeurs différentes : Virginie et Laurent, jeunes amants, sportifs, travailleurs et enthousiastes. Et du coté des vieux quinquas et socialistes déçus , une combinaison explosive avec sous le même toit la femme le mari et l'ex-amant soit Nicole, Jean et Maxime.
Tous les ingrédients sont donc réunis pour une guerre des nerfs magistrales pour la plus grande jubilation du public devant une heure et demi de ping-pong verbal entre le camp des idéalistes qui ont toujours raison car ils ont la jeunesse pour eux et celui des anciens, qui ont déjà vécu. Ces désabusés et désenchantés de la société, de mai 68 (aah Nicolas S. aurait apprécié!) et des sentiments.

Quand on n'a pour passer le temps que le papier tue-mouche comme contemplation, écouter les galipettes sonores et sadomasochistes des petite jeunes ou se rendre au marché dévaliser les étals de champignon, les minutes s'écoulent lentement et on ouvre bien vite la boîte de Pandore et devenir fou. a ce petit jeu là, ce Jules et Jim du passé y excelle en revenant sur l'incartade de l'épouse puis son penaud retour, l'occasion d'y apprendre quelques secrets doux-amers d'une frayeur de l'orage à un bébé et l'occasion d'asséner les idéaux oubliés de ses Bobos. "Moi mes élèves, je leur enseigne pour qu'ils votent socialiste mais au final ils finiront comme nous par voter Chirac." s'exclame -t-elle dans une de ses belles répliques.
Des clins d'oeil à l'actualité, la pièce en foisonne pour le plus grand délice du spectateur comme pas mal d'obsessions contemporaines du bio, aux oligos éléments, aux régimes infaillibles incarnés par Virginie pigiste de son étât dans une presse féminine de plus en plus dictatoriale sur l'existence idéal. Bien sûr avec Laurent c'est "the true love" et le jeune homme n'est pas moins le parfait (quoique...) reflet du gendre exemplaire, métrosexuel attentif et dynamique.
Chapeau bas à Aurore Auteuil, la fille de Daniel. Son enthousiasme et sa candeur sont attachants, dés qu'elle entre en scène, les paroles prennent un petit piquant supplémentaire peut-être grâce à la fabuleuse scène de ménage qui clôt la pièce^^;;.
Autre mention spéciale au décorateur. La qualité des décors de ce théâtre m'avait déjà frappé avec "Le meilleur professeur", une satire de l'Education Nationale dans son incurie et folie. On se sent tout à fait dans cette petite cuisine ou verres de vin et tasses de thé s'échangent avec rapidité. Dehors l'eau qui tape sur les carreaux et la lumière changeante du jour et de l'ampoule dans la petite cours plongent réellement le visiteur dans la campagne. Pas besoin d'imaginer, on y est!
Ils s'aiment sûrement beaucoup mais nous nous les adorons pour ces 80 minutes de réflexion grinçante sur notre société post-mitterandienne et les relations orageuses entre Mars et Vénus d'hier et d'aujourd'hui! On en redemanderait même. Plus léger que du Woody mais tout aussi savoureux :) Dans mon top 3 sans hésiter!
Je nous aime beaucoup: Petit Théâtre de Paris, 15, rue Blanche, 75009 Paris

mardi 10 octobre 2006

L'éventail de Lady Windermere

"Le meilleur moyen de résister à la tentation est encore d'y céder" et encore plus en direct. Ayant passé des années à proférer mon admiration d'Oscar Wilde sur toutes les tribunes disponibles, il était temps de le voir en action ! Je pensais accomplir cet hommage avec L'importance d'être constant que j'avais déjà abordé au cinéma en les compagnies délicieuses de Colin Firth (c'est avec Cate Blanchett, Nicole Kidman et Scarlett Johansson un des mots-clé pour me voir déballer sans esprit critique et critiques dans les salles obscures!) et Rupert Everett. La pièce se montait à Paris avec Lorant Deutsch. Finalement la prosternation eut lieu devant la première oeuvre théâtrale de M. Wilde : l'éventail de Lady Wendermere (en VO the Fan).
Oscar, qui la trouvait fade au regard des aventures de Constant et Gwendolyn, n'a pourtant pas à en rougir. C'est aussi délicieux et grinçant que ce à quoi ils nous a habitués. Abordant même un petit coté noir qui préfigure le portrait de Dorian Gray tant Lady Erlynne et ses tactiques sont à la hauteur de sa renommée sulfureuse.

Pénétrant une nouvelle fois dans la high society londonienne, l'auteur s'attaque au bonheur sans faille d'un couple parfait. En apparence car lord Windermere fréquente assidûment Lady Erlynne, une dame perdue de réputation. Pourquoi diable lui a-t-il acheté une maison, un coupé, lui verse-t-il des mensualités et exige que lady Windermere reçoive la gourgandine dont tout Londres pense qu'elle est sa maîtresse, à l'occasion de la reception donnée pour son 21ème anniversaire ? Eh bien, pardi c'est par amour pour… sa femme. Dur à avaler ? C'est tout le sel de la chose.

Si on devine bien vite le secret de Lady E. (ceux qui connaissent sur le bout des doigts La Guerre des Etoiles auront vite une petite idée!), le piquant demeure car ses motifs sont loin d'être purs et lorsque la redemption apparaît, elle ne la saisit qu'un instant dans un élan d'humanité oubliée et jusqu'à la dernière seconde de la pièce fait preuve de toute sa ruse pour embobiner Lord Windermere, le gaga Lord Augustus pour le plus grand plaisir du public qui ne voit pas le temps passer...car outre la menace que fait plâner cette femme de mauvaise vie, on est fébrile devant la tentation de Lady Windermere. Convaincue que son mari ne vaut pas mieux qu'un autre, elle cède aux sirènes de l'enjoleur et dandiesque Lord Darlington, ami de la famille et évidément secrètement amoureux de sa personne (mais Lady W. est tellement charmante qu'on ne peut qu'adhérer!) et qui tente le tout pour le tout en dévoilant avances et fuite en Inde...
Tout cela dans un décor sublîme : riche salon, fumoir et club, un canapé, un secrétaire où brillent de véritables bougies, des tableaux de maîtres et des rideaux luxueux sans oublier missives secrètes qui se trompent de destinataires et éventail en ivoire égaré (tout le drame de l'histoire). Les bons mots d'Oscar fusent dans la bouche de vipère de la Duchesse de Berwick, une version noble de Mme Bennet mais tout aussi déterminée et toquée qu'elle à marier sa fille (puisque tous les bons partis anglais sont pris, un américain roi de la conserve fera l'affaire malgré la déchéance nationalitaire puisque l'essentiel -l'abondance de sous- est préservé^^. De sa petite voix aigue et faussement distinguée, elle sème les graines du doutes dans l'esprit de Lady Windermere. Du coté des hommes, Oscar s'est trouvé une ombre en la présence de Cécil Graham, jeune de bonne famille complètement cynique et désabusé aux répliques qui font mouche face à l'éconduit soupirant Lord Darlington, dandy comme lui, qui maintient dans son coeur un peu de douceur et de mélancolique.
Cerise sur le gateau, les comédiens sont mêmes vétus de somptueux costumes d'époque et ne sont pas avares en changements de tenues comme ma photo floue ne permet pas de le voir ^^;;; Mention spéciale à la fabuleuse Geneviève Casile (ex de la Comédie Française) qui nous offre toute l'épaisseur et la dureté de Lady Erlynne. Seule petite réserve la distribution masculine... C'est que le charme séducteur de Sébastien Azzopardi alias le séduisant Lord Darlington (et l'inspiré metteur en scène)n'opère pas complètement, n'est pas dandy et wildesque, qui veut, c'est tout un art very British! Pour autant pas de quoi bouder son plaisir et renoncer à y courir (sauf que maintenant la pièce n'est plus vraiment à l'affiche mais qui sait, peut-être une tournée se fera ?) ^___^
Et pour se faire pardonner ce long retard/hiatus, quelques perles de sir Oscar :-) :
" De nos jours, nous avons tant de dettes que les compliments sont les seules choses que l’on offre avec plaisir ! "
- " Nous sommes tous dans le caniveau, mais certains d'entre nous regardent les étoiles. "
- " Il y a deux tragédies dans la vie : l'une est de ne pas satisfaire son désir et l'autre de le satisfaire. "
- " L'expérience est le nom que chacun donne à ses erreurs. "
- " Qu'est-ce qu'un cynique ? C'est un homme qui connaît le prix de tout et la valeur de rien."
Metteur en Scène : Sébastien Azzopardi
Auteur : Oscar Wilde / Adaptation : Pierre Laville.
Comédiens: Sébastien Azzopardi (Lord Darlington), Jean-Philippe Beche (Lord Windermere), Geneviève Casile (Madame Erlynne), Franck Desmedt (Cecil Graham), Jean-François Guilliet (Lord Augustus), André Le Gallo (Parker), Aude Sabin (Lady Agatha), Marie-France Santon (Duchesse de Berwick), Elisa Sergent (Lady Windermere).
La pièce est jouée au Théâtre 14 les mardi, mercredi vendredi et samedi à 20h30, le jeudi à 19h et le samedi en matinée à 16h.

samedi 7 octobre 2006

De profundis

Février 2004: Quelque part dans la campagne irlandaise dans les ruines d'une abbaye où le petit Oscar allait justement passer ses vacances.

De profundis clamavi ad te Domine
Domine exaudi vocem meam fiant
aures tuae intendentes in vocem deprecationis meaesi iniquitates observabis Domine
Domine quis sustinebit
quia apud te propitiatio est propter
legem tuam sustinui te Domine
sustinuit anima mea in verbum eius
speravit anima mea in Domino (*)

Je sais que l'humeur blogspotienne est plutôt à la poésie ( pour l'anglophone j'aime beaucoup Never Give All the Heart de Yeats et la Belle Dame Sans Merci de Keats mais ce détail ne surprendra personne!). Cependant, ce soir j'avais envie de parler de mon cher Oscar. Mes doigts n'ont pas l'énergie de dire ce soir tout le bien que j'ai pensé de l'éventail de Lady Windermere, pièce hélas retirée de l'affiche, mais ils sont encore émus de leurs retrouvailles avec son De profundis.
De par son nom, éponyme du psaume 130 (en VF, des profondeurs) que nous avions étudié en latin (jolie construction avec ad), ce texte m'a énormément touchée car il recèle le même cri que la prière (utilisée dans le rituel catholique lors de la prière des morts) et plus loin dans cette longue missive, O.W retrouve son ironie mordante. Wilde l'a composé alors qu'il entamait sa deuxième année en prison et qu'il n'avait reçu aucune nouvelle de son amant, Alfred Bosie' Douglas. Leur liaison avait conduit le père du jeune homme à attaquer Wilde sur ses moeurs et à jeter le dramaturge en prison.
Voici quelques extraits du début de cet epistole de la vie carcérale:
"...Suffering is one very long moment. We cannot divide
it by seasons. We can only record its moods, and chronicle their
return. With us time itself does not progress. It
revolves. The paralysing immobility of a life every circumstance of
which is regulated after an unchangeable pattern, so that we eat and drink and
lie down and pray, according to the inflexible laws of an iron formula.
(...)
For us there is only one season, the season of sorrow.
The very sun and moon seem taken from us. Outside, the day may be blue and
gold, but the light that creeps down through the thickly-muffled glass of the
small iron-barred window beneath which one sits is grey and niggard. It is
always twilight in one's cell, as it is always twilight in one's heart.
(...)
When I was brought down from my prison to the Court of
Bankruptcy, between two policemen, - waited in the long dreary corridor that,
before the whole crowd, whom an action so sweet and simple hushed into silence,
he might gravely raise his hat to me, as, handcuffed and with bowed head, I
passed him by. Men have gone to heaven for smaller things than that.
It was in this spirit, and with this mode of love, that the saints knelt down to
wash the feet of the poor, or stooped to kiss the leper on the cheek. It
is not a thing for which one can render formal thanks in formal words. I
store it in the treasure-house of my heart. I keep it there as a secret
debt that I am glad to think I can never possibly repay. It is embalmed
and kept sweet by the myrrh and cassia of many tears. When wisdom has been
profitless to me, philosophy barren, the memory of that little, lovely, silent
act of love has unsealed for me all the wells of pity.
I must say to myself that I ruined myself, and that nobody
great or small can be ruined except by his own hand. I am quite ready to
say so. I am trying to say so, though they may not think it at the present
moment. Terrible as was what the world did to me, what I did to myself was
far more terrible still."
(*)Des profondeurs je t’appelle, Seigneur : Seigneur, entends ma voix ; que tes oreilles soient attentives à ma voix suppliante ! Si tu retiens les fautes, Seigneur ! Seigneur, qui subsistera ? Mais tu disposes du pardon et l’on te craindra. J’attends le Seigneur, j’attends de toute mon âme et j’espère en sa parole.

jeudi 5 octobre 2006

...coule la Seine

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Le Pont Mirabeau
Sous le pont Mirabeau coule la Seine
Et nos amours
Faut-il qu'il m'en souvienne
La joie venait toujours après la peine
Vienne la nuit sonne l'heure
Les jours s'en vont je demeure
Les mains dans les mains restons face à face
Tandis que sous
Le pont de nos bras passe
Des éternels regards l'onde si lasse
Vienne la nuit sonne l'heure
Les jours s'en vont je demeure
L'amour s'en va comme cette eau courante
L'amour s'en va
Comme la vie est lente
Et comme l'Espérance est violente
Vienne la nuit sonne l'heure
Les jours s'en vont je demeure
Passent les jours et passent les semaines
Ni temps passé
Ni les amours reviennent
Sous le pont Mirabeau coule la Seine
Vienne la nuit sonne l'heure
Les jours s'en vont je demeure
in Alcools de Guillaume Appolinaire
Lorsqu'on nous a donné ce recueil à étudier en seconde, j'avoue que j'ai eu beaucoup de mal à me laisser prendre au jeu, jusqu'à ce poème si délicat, comme le courant du fleuve, qui glisse immortel sous ponts toujours plus nombreux de la ville lumière. Et en ce sort de brume, chaque arche de la capitale, arpentée par autant de pas anxieux et transportés, est devenu ce pont. Mirabeau.




Le froid prenant ses quartiers d'hiver, les températures ont rapidement biassé emmenant dans leur sillage une brume persistante tout à fait inhabituelle. Elle arrive dés 18h et ne se lève qu'à 10h le lendemain enveloppant amoureusement les bords de la Seine. Si le jour tout est gris, le soir les teintes lumineuses et auréolées colorent la nuit pour la plus grande fascination des yeux et la grande myopie de l'objectif de l'appareil photo. Difficile de trouver un cliché qui face honneur à cette atmosphère en demi-teinte. Ainsi on ne distingue plus les étages supérieurs du paquebot de Bercy.

Vienne la nuit sonne l'heure
Les jours s'en vont je demeure

mardi 3 octobre 2006

Retour sur la Reine Margot

En faisant un petit tour nocturne sur le net comme cela m'arrive, je suis tombée sur la bande annonce de la Reine Margot de Chéreau que j'avais mentionné quelques entrées plus bas. Il se trouve que la scène du mariage y figure en bonne place.
Alors pour les yeux des curieux et des profanes, la démonstration de ce moment symbolique des années de sang des Valois est disponible pour visionnage.




La Reine Margot (bande-annonce)
envoyé par hasard



Cette B.A m'a frappée par sa sobriété. Je ne suis pas sûre qu'on la monterait de manière aussi minimaliste aujourd'hui (commentaire peu loquace, une grosse scène puis scénettes sans effets de fondu ou flash). Mais cette humilité réussissait parfaitement son effet. Comment ne pas frissonner devant les douze coups de Saint Germain l'Auxerrois, qui marqua le début du Massacre de la Saint Barthélémy ?

Pour mémoire Henri de Navarre, futur Henri IV, était venu à Paris accompagné de toute la noblesse huguenote. Ceux-ci était malheureusement identifiables et pourchassables le jour de la fatidique nuit: tous de noir vétu, y compris la marié, pour honorer la mémoire de Jeanne d'Albret, reine de Navarre et sa mère, mystérieusement emportée par un mal foudroyant dont certains y virent la patte empoisonnée de Catherine de Médicis.
ps : si jamais ce passage vous a conquis (j'pense à Vito déjà bien versé dans les Tudors), youtube propose des extraits plus longs dont celui du massacre vu par la Môle. La paternité du massacre a souvent été attribué à Catherine de Médicis mas il semble maintenant que l'on réalise aussi à quel point le duc d'Anjou (Henri III) y fut une force motrice. Son implication lui permis de s'affirmer définitivement comme un acteur majeur du Conseil du roi (son frère Charles IX). Le peuple de Paris ne fut pas difficile à persuader. Excessivement catholiques, ils détestaient l'idée même de ce mariage qui devait scéller la réconcilliation entre Protestants et Catholiques officialisée par la Paix de Saint-Germain-en-Laye (1570). Et c'est pour eux qu'Henri IV s'écria soit-disant 'Paris vaut bien une messe" puis se convertit, pouvant enfin asseoir ses fesses plus tranquilement sur le trône de France! Un montage des meilleures scènes adjaniesques est aussi visible, le mariage y figure plus longuement.

lundi 2 octobre 2006

Orgueil et Préjugés (dédicace à 'Ry, Iphia et toutes les autres!)

Entrée dédiée aux distingué(e)s admiratrices de Melle Jane Austen et de sa plus belle création/ture...

Mon coeur se conssumme depuis des années d'une passion jamais chancelante pour un seul homme (et même pas Irlandais, nah!), j'ai nommé et je me prosterne devant M. Darcy, ténébreux héros né de la plume de la délicate Jane Austen. Ame torturée et de prime abord profondément associal, une faille qui cache un homme réservé, écrasé par les responsabilités de son rang et généreux, il est l'auteur d'une des plus émouvantes et calamiteuses déclarations d'amour de la littérature(*).

Notre première rencontre ? Comment pourrais-je oublier ce moment de grâce télévisuelle éternelle ? Ce fut un samedi soir devant TMC qui diffusait la brillante adaptation, made in BBC, de ce classique anglais. A jamais, désormais pour moi, Fitzwilliam Darcy of Pemberley and owner of the half of Derbyshire with 10.000 £ a year, prendra les traits du sombre Colin Firth pendant que les yeux impertinents d'Elizabeth appartiennent à la méconnue et blonde Jennifer Ehle.

Des délices qu'il faut partager, surtout une fois qu'on a gouté au poison austenien via le récent Pride and Prejudice de Joe Wright qui mettait en scène la virginale Keira Knightley. Parce que tu te demandais, 'Ry, à quoi pouvait ressembler cette version 'beeb' d'Orgueil et Préjugés, voici un avant-goût de ce trésor...c'est aussi la musique -Nothing Else Matters par Apolyptica- qui m'a fait penser à toi, je suis sûre que tu apprécieras !



Si je n'avais pas posé les yeux sur ce bijou, j'aurais eu un coup de foudre tout aussi puissant pour l'oeuvre de Joe Wright. Ce film brille par une esthétique et des jeux de caméra époutousflants qui magnifient cette histoire d'amour.

La distribution des rôles est soignée, surpasse pour les personnages secondaires de Jane, Lady Catherine et Whickham, cette fois-ci beau comme un dieu les six épisodes bbciens, une réussite moins évidente avec Keira, le livre précise qu'Elizabeth n'est pas une "beauté classique" ou avec Matthew qui ne dégage pas à mes yeux conquis le même charisme que Colin. Mais en deux heures, on ne lui donne pas beaucoup de péllicule.

L'enthousiasme de Keira et Matthew est sincère mais il manque un petit je-ne-sais-quoi, pour moi, la patte austenienne. Pour tenir en format cinéma, l'intrigue a été raccourcie (quid de la rencontre entre Darcy et Jane à Londres ?, de la lettre d'explications bien plus déchirante? et de la deuxième soeur de Bingley ?) tout se telescope alors que dans le livre le pas est lent (9 mois à un an).
Deux interprétations fantaisistes frisent particulièrement le contre sens. Dans le livre, il est précisé que Longbourn est rattaché à des fermes puisque M. Bennet est un petit gentleman et propriétaire terrien. Mais Longbourn est la demeure familiale entourée d'un jardin et aux alentours des champs. Mais jamais comme le film le suggère, Longbourn n'est mitoyen de la ferme. Cet adaptation est génante car elle affaiblit un des arguments d'Elizabeth (que le fil logiquement n'a pas joué à fond) qu'elle est ' a gentleman's daughter', que par conséquent Darcy puis Lady Catherine sont injurieux dans leur condescendance. Par ailleurs, Joe Wright prend le parti de montrer l'exubérance de Jane et Lizzy : elles rient, parfois peu poliment (cela ressemble à des grognements), écoutent aux portes mais qu'est ce qui les distinguent donc de la frivolité et l'absence de manière de Kitty et Lydia? pourtant mainte fois soulignées dans le livre et commentées par Darcy qui lui confie 'que jamais elle ni jane n'ont fait preuve d'un manque de convenance'.

La pudeur et la passion contenue à grand peine (la Raison contre les Sentiments comme cet autre chef d'oeuvre de la dame de Bath) qui ronge les personnages est à peine esquissée. Ni Joe Wright, ni Keira, ni Matthew n'ont lu le livre et c'est ce qui leur donnait cet extrême liberté de ton, que j'ai appréciée hein, très moderne, voire trop comtemporaine parfois... Chez Austen tout passe par des regards, par des comtemplations, par la sensualité et par des non-dits. Jamais à la régence on aurait vu Elizabeth errer en chemise de nuit ou Darcy l'aborder en pleine nature sous le kiosque ou énamourré au point de s'écrier "I love, I love, I love you" le col de sa chemise déboutonnée ou Bingley revenir derechef pour se mettre à genoux devant Jane.

Toute cette comunication silencieuse qui montre le basculement des deux protagonistes a disparu, or cela leur donnait toute leur profondeur. Et lorsque j'ai vu ce montage musical (dans les semaines à venir ils vont faire une grande concurrence au théâtre ^^^;;), j'ai retrouvé à nouveau cette passion réfrénée: de la rencontre impromptue du billard à leur danse (très bien montrée par Wright également) en passant par la rédaction à l'unique larme et la remise de LA LETTRE, les retrouvailles à Pemberley. Colin Firth aura toujours le visage impassible, ses yeux seuls trahissent ses agonies (cf 2'O5'').

Enfin, je vais m'arrêter car peut-être en tant que lectrice d'Orgeil et Préjugés tu as une opinion radicalement différente ^___________^


(*) avec celle de Valmont dans sa lettre à Mme de Tourvel sur le dos d'Emilie. Bien que les deux ouvrages soient aux antipodes, ils sont tout deux mes bibles de chevet, des livres qui m'ont laissé le coeur chamboulé, car au fond les Liaisons Dangereuses ne sont-elles pas la vision noire, cynique et hyper-réaliste du romantisme d'Orgueil et Préjugés ?)Et je n'oublie pas d'avoir vécu une semaine paradisiaque sur les traces de Melle Austen et des lieux de tournage de la BBC à l'été 2001. Le Derbyshire rivalise d'atouts avec le Connemara :-)

PS : pour une comparaison en image entre les deux films, deux petites merveilles de drôlerie sonore dénichée (toujours) sur youtube :


1ère partie
2ème partie

Et deux images insolites pour conclure:

Des coulisses de P&P... (Darcy, Bingley-joué par le cousin d'Helena Bonham Carter, Crispin- et Elizabeth)
...à Bridget Jones (relecture moderne et célibattante d'Orgueil et Préjugés!), lol à la polissonerie de Mister Hugh Grant
Merci à Touraine sereine pour m'avoir référencé dans une note sur une autre adaptation d'Orgueil et Préjugés, celle de Laurence Olivier. Ma reflexion était plus personnelle qu'argumentée donc c'est une sympathique attention!